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Présidentielle kenyane: Voici la faute diplomatique de Paul Biya

Alors que les résultats proclamant William Ruto président de la République du Kenya ont encore un caractère provisoire puisque Raila Odinga, son challenger, a saisi la cour suprême pour invalider le scrutin, le Chef de l’État a envoyé un télégramme de félicitations au vice-président sortant. Fait quasi inédit qui jure avec le principe de non-ingérence qui a toujours caractérisé la politique étrangère du pays du Cameroun.

Alors que les résultats proclamant William Ruto président de la République du Kenya ont encore un caractère provisoire puisque Raila Odinga, son challenger, a saisi la cour suprême pour invalider le scrutin, le Chef de l’État a envoyé un télégramme de félicitations au vice-président sortant. Fait quasi inédit qui jure avec le principe de non-ingérence qui a toujours caractérisé la politique étrangère du pays du Cameroun.

Le fait a été relayé par les médias à capitaux publics (CRTV radio et télé). Mais, il n’a pas semblé émouvoir outre mesure, et pourtant, il tranche avec la tradition légaliste du président de la République, Paul Biya. En effet, le 22 août dernier, le Cameroun, par la voix de celui qui incarne sa souveraineté sur le plan international, le président de la République, a adressé un télégramme officiel de félicitations au candidat à l’élection présidentielle, William Ruto, pour son «élection». «Votre élection à la magistrature suprême de votre pays, m’offre l’agréable opportunité de vous adresser mes vives et chaleureuses félicitations», écrit Paul Biya à William Ruto.

Tenues le 09 août dernier, les résultats des élections présidentielles kenyanes sont rendus publics 6 jours plus tard à savoir le 15 août. Selon la commission électorale de ce pays, le vice-sortant, William Ruto est déclaré vainqueur avec plus 7,17 millions de votes, soit 50,49%. Raila Odinga, son challenger enregistre 48,85%. Mais, ce résultat est contesté de l’intérieur par 4 membres sur 7 de la commission électorale reprochant à son président sa gestion jugée opaque et son absence de concertation. Et aussi de Raila Odinga qui dénonce des fraudes et qualifie ces résultats de «parodie». Il saisit, d’ailleurs, le lundi 22 août, la cour suprême. Le recours «leur a déjà été envoyé et ils le verront bientôt» déclare un membre de l’équipe juridique de l’opposant Raila Odinga.

«La copie physique doit arriver avant 14 h (11 h (Gmt), heure limite pour déposer un recours», renchérit-il. La cour suprême kenyane dispose de 14 jours pour rendre sa décision. Il est donc constant que le télégramme du Chef de l’État camerounais arrive trop tôt. Car, le contentieux électoral n’a pas encore été vidé par les juridictions ad hoc du Kenya. Cette attitude pourrait être interpréter par Nairobi comme une forme d’ingérence. Ce d’autant plus que le candidat Raila Odinga a le soutien du président sortant Uhuru Kenyatta.

Au-delà du fait qu’il pourrait embarrasser la diplomatie kenyane, il tranche avec un des principes majeurs de la politique étrangère du Cameroun. À savoir celui de la non-ingérence dans les affaires internes des États. Un principe d’ailleurs consacré par la charte des Nations unies de 1945. «Contrairement à d’autres États et organismes, le Cameroun reste fidèle au principe de droit international de non-ingérence dans les affaires internes des États posé par la Charte des Nations unies de 1945 et élément structurant de sa politique étrangère. Cette posture politique et diplomatique s’est traduite à maintes reprises par une abstention assumée du Cameroun sur des sujets qui interpellent au premier chef la souveraineté d’autres États», éclaire l’internationaliste Christian Pout, coordonnateur du Centre africain d’études internationales, diplomatiques, économiques et stratégiques, sur cette posture principielle de la politique «étrangère du Cameroun. C’est d’ailleurs au nom de ce principe que Yaoundé s’est toujours défendu pour faire barrage aux velléités d’ingérence, dans le différend camerouno-camerounais qui se donne à voir dans la zone anglophone depuis 2017, d’un certain nombre d’acteurs internationaux».

Par ailleurs, on peut relever que ce télégramme pourrait sérieusement mettre à mal les relations diplomatiques entre le Cameroun et le Kenya au cas où la cour suprême annulait cette élection et que Raila Odinga arrivait aux affaires. Une hypothèse qui ne relève pas de la simple gymnastique intellectuelle. Car, en 2017, Uhuru Kenyatta est proclamé vainqueur de l’élection présidentielle par la commission électorale avec 54, 27% face à Raila Odinga, son opposant, qui récolte 44,74%. Qui saisit, aussitôt, la cour suprême pour dénoncer les différentes irrégularités ayant émaillé le scrutin. Vendredi le 1er septembre 2017, cette juridiction ordonne le déroulement de nouvelles élections.

Celles-ci ont lieu le 17 octobre et le président Kenyatta en sort vainqueur. Si, fort extraordinairement, l’élection est reprise et Odinga la gagnait, les vœux d’une excellente coopération entre les deux États exprimés par Paul Biya dans son télégramme risqueraient d’être sans lendemains dans la mesure où le Cameroun aurait clairement exprimé sa préférence pour l’accession à la magistrature suprême du vice-président William Ruto par ce message de félicitations du 22 août dont l’opportunité reste questionnable.

ref: camerounweb

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