Critique
Quelques mois après le « procès Charlie », la dessinatrice Coco livre son expérience de l’horreur terroriste dans un récit graphique.
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Son témoignage a été l’un des moments forts du « procès Charlie » de l’automne dernier. Ses paroles avaient été accablantes. Ses dessins à l’encre noire et à l’aquarelle parlent pour elle aujourd’hui: l’auteur et caricaturiste Coco est une rescapée de l’attentat terroriste du 7 janvier 2015, au cours duquel douze personnes ont été assassinées. En préparation de son intervention au bar, la jeune femme, qui se sentait jusqu’alors incapable de s’exprimer à travers ce traumatisme profond, a commencé à représenter l’indicible. Pour raconter «elle» le 7 janvier et la lenteur de la reconstruction, le fragile retour à la vie que la jeune maman a commencé à tout prix quand elle avait trente (1) ans.
Le 7 janvier est l’un de ces jours terribles pour Coco dont vous ne pourrez peut-être jamais vous remettre complètement. C’est cette onde fondamentale protéiforme, ce «coup de vague» aux graphismes empruntés à Hokusai, dont le poids ouvre l’histoire, bat la jeune femme et saisit le lecteur. Et Coco raconte la culpabilité de ceux qui ont failli mourir mais n’y sont pas restés; la honte de s’échapper quand d’autres, ses maîtres et amis, ont été tués – Charb, Cabu, Tignous et tout le monde; l’horreur d’avoir été réduit à cette «machine» avec laquelle des terroristes ont fait irruption dans la rédaction du journal satirique. Pour la création du code d’accès sous le joug des Kalachnikovs.
Cocos 7 janvier, ces pages sont également coupées d’éclats rouge sang et criant avec colère « et si » cela aurait pu tout changer, mais cela ne s’est pas produit – » Et si j’essayais de la désarmer? » Puis la fusillade et le silence qui ont suivi, complètement engloutis par ces planches sombres et vides. La représentation de l’horreur s’arrête là. Rien à voir. En dernier héritage, les fantômes de terroristes cagoulés envahissent les requins aux yeux béants d’inhumanité …
Draw Again est le récit personnel d’une blessure collective que l’auteur voulait sobrement et sans pathos – mais non sans humour et tendresse. Dans une distanciation impérieuse, son trait par ailleurs réaliste s’estompe devant le petit Coco stylisé, où le « long menton long du nez » est très éloigné de son visage gracieux. Elle raconte les jours qui ont suivi, la mobilisation internationale pour la liberté d’expression, dans laquelle elle n’est que l’ombre d’elle-même, « la chaîne sans fin des funérailles » et la douleur d’exister – « Il y a quelque chose d’insupportable dans la beauté … »
Et puis encore les jours suivants, dans lesquels on apprend à vivre « avec », où le combat reprend au milieu du chaos avec stylo et crayon – la créatrice qui poursuit sa collaboration avec Charlie Hebdo devient l’artiste. Caricaturiste en charge de la libération quotidienne, une première pour une femme. Un combat dans lequel Coco nous rappelle ce qu’il faut pour dessiner, écrire, penser, défendre. Du souffle et de l’humanité.
Après son élection à l’Académie des Beaux-Arts en 2020, le créateur fera l’objet d’une exposition – un …
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Titre associé :
– Cocos ‘Draw Encore une fois: le retour à la vie après l’attentat contre Charlie Hebdo
Ref: https://www.la-croix.com